Dans une société en constante urbanisation, les villes peuvent-elles devenir les alliées de la nature ?
Actuellement, plus de la moitié des habitants habitent en ville à travers le monde.
Cette concentration de population a un impact sur les écosystèmes et participe à l’érosion de la biodiversité urbaine.
Les villes ont donc un rôle à jouer pour prévenir l’extinction de certaines espèces et la détérioration d’écosystèmes vitaux.
L’objectif est de promouvoir la faune et la flore locales en zone urbaine, dans l’intérêt des résidents et pour la santé de notre planète.
Cette démarche a déjà été adoptée par de nombreuses collectivités et entreprises.
Comment les zones urbaines peuvent-elles alors contribuer à l’enrichissement de la biodiversité urbaine ?
Biodiversité en milieu urbain : un enjeu de taille pour les collectivités et les entreprises
Même en milieu urbain, la nature offre d’importants bénéfices.
Les espaces verts participent à la purification de l’air. Ils supervisent aussi le climat tout en offrant un habitat à une multitude d’espèces.
Ainsi, la ville de Paris héberge à elle seule des centaines d’espèces de mammifères, d’oiseaux et de plantes à fleurs.
Ces écosystèmes en milieu urbain sont essentiels pour le bien-être et la santé des citadins. Mais aussi pour l’économie.
La nature offre en effet chaque année des services équivalant à 23 500 milliards d’euros à l’économie mondiale.
Il est donc essentiel de conserver cette richesse.
Les responsables locaux ont saisi l’importance d’intégrer la biodiversité urbaine aux politiques gouvernementales.
Il s’agit bien sûr de préserver le patrimoine vivant, mais aussi d’anticiper les risques d’inondations, de canicules et de diminution des ressources.
En France, par exemple, l’utilisation de pesticides par les collectivités est interdite pour l’entretien des espaces verts.
Cette évolution législative, adoptée par de nombreuses villes, vise à protéger la faune et la flore locales en milieu urbain.
Pourtant, 75 % des entreprises sont encore implantées à moins de 5 km d’une zone naturelle d’intérêt écologique.
Les acteurs privés ont donc tout intérêt à prendre en compte la biodiversité dans leur stratégie, non seulement par responsabilité sociétale mais aussi, parfois, pour pérenniser leurs activités.
Incorporer la nature dans les initiatives urbaines
L’expansion urbaine, en détruisant les habitats naturels, est la principale cause de la diminution de la biodiversité.
Les villes devraient donc s’harmoniser avec la nature à chaque phase de leur développement. Cela implique de préserver et d’inclure les espaces verts dans les initiatives urbaines. Mais aussi de relier ces espaces entre eux afin de former un véritable réseau écologique.
Créer des continuités écologiques
Les corridors verts et les trames bleues (liens entre les cours d’eau) permettent aux animaux de circuler et aux plantes de se disséminer à travers la ville.
Préserver ces continuités, ou en aménager de nouvelles, est essentiel pour connecter les réservoirs de biodiversité isolés (parcs, bois, friches).
Avant chaque grand projet d’urbanisme, repérer les milieux naturels existants et les chemins de passage de la faune évite de couper ces corridors.
Des solutions novatrices émergent :
- Des écoducs (passages pour la faune au-dessus ou en dessous des routes)
- Des trames vertes le long des lignes de chemin de fer
- Des toits végétalisés interconnectés qui forment des « ponts » pour les insectes volants.
Développer des infrastructures vertes
Végétaliser la ville ne se limite pas aux parcs.
De nombreuses métropoles incorporent désormais la verdure dans les bâtiments et les espaces publics.
Toits végétalisés, façades couvertes de plantes, murs végétaux et trottoirs « verts » se multiplient.
Ces infrastructures vertes offrent de nouveaux habitats pour la microfaune (oiseaux, insectes, pollinisateurs) tout en améliorant le confort urbain (isolation thermique, réduction des îlots de chaleur).
Des exemples pionniers montrent la voie.
À Paris, les nouveaux immeubles commerciaux doivent obligatoirement intégrer un toit végétal ou des panneaux solaires.
À Singapour, des gratte-ciels intègrent de véritables jardins suspendus.
Ces initiatives responsables participent à rendre la ville plus résiliente et plus animée.
L’important verdissement des espaces disponibles offre, par ailleurs, la possibilité de récupérer des zones cruciales pour la flore locale.
Depuis plus de deux décennies, à Bâle, en Suisse, une politique audacieuse exige ainsi la végétalisation de tous les toits plats qui ont une superficie supérieure à 10 m².
Résultat : environ 4 000 toitures vertes ont été mises en place, ce qui fait de Bâle la ville disposant de la plus importante superficie de toits végétalisés par habitant dans le monde.
Même des orchidées rares autrefois menacées s’y épanouissent, témoins qu’une planification urbaine avant-gardiste peut véritablement encourager la biodiversité en milieu urbain.
Gérer durablement les espaces verts urbains
Privilégier une gestion écologique et raisonnée
Réserver des espaces à la nature ne suffit pas.
Encore faut-il les gérer de manière écologique pour qu’ils regorgent de vie.
Les collectivités adoptent de plus en plus des pratiques de gestion différenciée des espaces verts. Il s’agit d’ajuster l’entretien en fonction des lieux.
Par exemple, tondre moins fréquemment certaines pelouses pour laisser fleurir des plantes sauvages, ou conserver des zones de friche propices à la petite faune. Ce mode de gestion permet de préserver la diversité des micro-habitats en ville.
Un carré d’herbes hautes ou une haie champêtre peuvent toutes deux héberger insectes et oiseaux utiles, là où un gazon ras serait au contraire quasi stérile du point de vue de la biodiversité urbaine.
En parallèle, la lutte biologique remplace les traitements chimiques.
La plupart des grandes villes sont désormais « zéro pesticide », conformément à la réglementation et par conviction environnementale.
Bannir les produits phytosanitaires a des effets très positifs : retour des pollinisateurs (abeilles, papillons) dans les jardins urbains, sols plus vivants grâce aux vers de terre et aux micro-organismes, oiseaux insectivores de nouveau présents pour réguler les ravageurs.
À Lille ou à Nantes par exemple, on observe un fleurissement spontané des trottoirs et des pieds d’arbres depuis l’arrêt des herbicides, signe d’une flore urbaine qui reprend ses droits.
Cette végétation spontanée, autrefois perçue comme de la « mauvaise herbe », est aujourd’hui mieux acceptée et même valorisée pour son rôle écologique. Elle participe à la trame verte de la ville et enrichit la biodiversité urbaine.
Équilibrer les espèces
La gestion durable des espaces urbains passe aussi par la maîtrise des espèces exotiques envahissantes.
Ces plantes ou animaux introduits hors de leur milieu naturel peuvent en effet proliférer au détriment des espèces locales.
Les municipalités s’organisent donc pour les identifier et les contenir.
La ville de Brest a ainsi mis en place un plan de bataille contre les plantes invasives sur son territoire.
Les équipes municipales ont été formées pour reconnaître les végétaux problématiques et intervenir rapidement.
Une campagne de sensibilisation du public a également été menée, avec distribution de guides pratiques, afin que chacun et chacune puisse contribuer à cet effort.
Grâce à cet engagement collectif, la progression de plus d’une douzaine d’espèces végétales invasives a été freinée à Brest Métropole.