Vers des cimetières “zéro phyto”
La végétalisation des cimetières inclut désormais la démarche “zéro phyto”, conformément à la loi Labbé de 2014 visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires.
Dans le cadre de l’élargissement de l’arrêté du 15 janvier 2021 sur l’interdiction des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts et de la voirie, l’interdiction s’étend dorénavant aux cimetières.
Concrètement, depuis le 1ᵉʳ juillet 2022, tous les lieux fréquentés par le public ou à usage collectif, incluant les cimetières, ont pour interdiction d’utiliser des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts.
Cette interdiction vise à préserver l’environnement et la santé publique en limitant l’usage de pesticides chimiques de synthèse.
Les cimetières zéro-phyto, exemptés de ces produits, doivent alors adopter des alternatives écologiques pour leur entretien. Tout contrevenant s’expose à des sanctions sévères allant jusqu’à 6 mois d’emprisonnement et 150 000 € d’amende.
Choisir des fleurs adaptées aux cimetières
Le choix des végétaux dans les cimetières nécessite une sélection minutieuse pour garantir une belle apparence tout en respectant les contraintes d’entretien et les spécificités des sépultures.
Les plantes résilientes sont essentielles, notamment à cause du manque de passage et de soins réguliers ou encore des conditions difficiles comme le sol appauvri et l’exposition au soleil.
Le style de tombe influe également sur le type de plantation envisageable, des pots pour les monuments imposants aux plantations directes pour les tombes en pleine terre.
Des fleurs adaptées, comme les annuelles et bisannuelles, comprennent par exemple les gazanias, les pâquerettes, les pensées, ou encore les œillets.
Du côté des plantes à bulbes, les crocus, les muscaris, narcisses et autres tulipes seront à la fois pratiques et peu exigeants.
Pour ce qui est des plantes couvre-sol, la petite pervenche, la joubarbe, l’euphorbe, le sedum nain ou encore le géranium vivace étouffent toute possibilité d’adventices, le tout sans nécessiter d’entretien.
Regroupées et bien paillées, les vivaces, telles que les chrysanthèmes, la lavande ou la bruyère, seront capables de résister aux conditions difficiles.
Enfin, les rosiers, les grimpantes et arbustes comme le lilas ou le fusain, demandent aussi peu de soins et ajoutent une touche esthétique.
Cette diversité de végétaux permet d’embellir les sépultures tout en tenant compte des contraintes d’entretien et des caractéristiques spécifiques de chaque type de tombe.
Exemples de cimetières végétalisés
À Besançon, vers une Intégration de la végétalisation dans les cimetières
En avance sur son temps, la ville de Besançon a adopté une approche respectueuse de l’environnement dans ses cinq cimetières depuis près de dix ans, promouvant une gestion différenciée des espaces verts et le tri des déchets verts.
Les zones de tri des déchets verts ont réduit significativement les déchets ramassés. La biodiversité est favorisée par l’abandon des produits phytosanitaires et l’utilisation de méthodes écologiques telles que l’utilisation de matériel électrique, la fauche tardive et la végétalisation des allées sablées.
Des fleurs sauvages sont semées pour atténuer les îlots de chaleur et encourager la présence d’insectes pollinisateurs, tout en respectant la dignité des lieux de recueillement.
En 2018, deux cimetières ont reçu le label EcoJardin pour ces pratiques en faveur de la biodiversité et de la santé publique.
À Strasbourg, des cimetières végétalisés et “zéro phyto”
La ville de Strasbourg fait aussi partie des collectivités visionnaires en matière de végétalisation des cimetières et de pratique zéro phyto.
Dès 2008, en réponse à des problématiques de pollution des eaux, la ville lance un vaste projet visant à éliminer l’usage des pesticides dans ces espaces funéraires.
Face aux défis techniques et aux réactions des familles, Strasbourg a expérimenté diverses méthodes de désherbage non chimiques et a dû faire face à de nombreux défis entre 2008 et 2016.
Pour bien comprendre le contexte local et l’ampleur de la tâche, il faut noter qu’à Strasbourg la végétalisation des cimetières est culturellement implantée.
Plus concrètement, les cimetières strasbourgeois représentent plus de 50 hectares d’espaces dont 11 ha engazonnés, plus de 3 000 arbres dont plus de 2200 feuillus, sans compter les 24 km de haies et les 3 250 rosiers.
Au terme d’un interminable combat pour mettre fin aux mauvaises herbes, en 2016, un tournant majeur a été pris, privilégiant la végétalisation pour dissimuler les adventices.
Cette transition a conduit à repenser les sols, à utiliser des mélanges de graines spécifiques pour créer un gazon adapté et à adopter de nouveaux équipements d’entretien adaptés aux espaces restreints entre les tombes.
Cette évolution vise à transformer les cimetières en espaces verts apaisants, tout en cherchant à augmenter la biodiversité et à offrir un environnement respectueux pour les familles endeuillées.
Des projets futurs incluent l’introduction de micro-forêts funéraires et de stimulations sensorielles pour améliorer le bien-être des visiteurs.
Gestion de la flore dans le Bassin Versant de Grand-Lieu
Depuis 2017, la CPIE (Centre Permanent d’Initiatives pour l’Environnement), en association avec le Syndicat du Bassin Versant Grand-Lieu (agglomération nantaise), œuvre pour la végétalisation des cimetières.
La démarche de gestion florale des cimetières se déroule dans le cadre du Bassin Versant de Grand-Lieu, une région comprenant plusieurs communes dont l’une des préoccupations est la diminution de l’utilisation des pesticides sur l’espace public.
Cette initiative s’inscrit dans une dynamique plus large de transition écologique et de préservation de l’environnement.
Les cimetières, par leur spécificité historique et culturelle, traditionnellement entretenus de manière minérale et sans flore spontanée, représentent un défi majeur dans cette démarche.
La transition vers une gestion florale s’effectue pour diverses raisons : réduire l’usage de pesticides, favoriser la biodiversité, diminuer les coûts d’entretien et offrir des espaces plus respectueux de l’environnement et propices à la contemplation pour les familles endeuillées.
Pour atteindre cet objectif, des programmes de formation ont été mis en place pour sensibiliser et former les agents techniques des communes à reconnaître, gérer et entretenir la flore spontanée spécifique à chaque cimetière.
Des livrets sont élaborés pour chaque commune, fournissant des informations sur les plantes à conserver, à surveiller ou à éliminer.
Enfin, l’utilisation d’outils adaptés, tels que des tondeuses spécifiques, ainsi que des techniques de désherbage sélectif, sont également encouragés pour garantir une gestion florale et écologique des cimetières.
Tour d’horizon des labels qui récompensent les bonnes pratiques de l’aménagement paysager
Conclusion
La végétalisation des cimetières vise à transformer ces lieux solennels en espaces verts plus écologiques et plus accueillants pour les familles.
Ceci est possible grâce à la suppression de l’usage des pesticides, ainsi qu’à des mesures propices au développement de la faune et de la flore.
La végétalisation des cimetières offre non seulement un cadre naturel, réconfortant et paisible aux visiteurs, mais aussi des habitats naturels et des sources de nourriture pour les oiseaux, petits mammifères et autres insectes pollinisateurs.
Finalement, la végétalisation des cimetières permet de concilier contemplation sereine et atmosphère paisible, esthétique naturelle et respect des lieux, le tout dans le cadre de la transition écologique et de la protection de la biodiversité.