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07 février 2024

Quels risques représentent la fonte du permafrost ?

Liée au changement climatique et à l’augmentation des températures mondiales, la fonte du permafrost porte avec elle plusieurs dangers majeurs pour l’humanité. Définition, causes, conséquences, prévisions, solutions… Aujourd’hui, découvrons tout ce qu’il faut savoir sur la fonte du permafrost !

Zoom sur les risques de la fonte du permafrost

Qu’est-ce que le permafrost ?

Le permafrost ou pergélisol en français désigne un sol gelé en permanence, caractérisé par une température inférieure à 0 °C pendant au moins deux années consécutives.

Le permafrost couvre environ 20 % des terres émergées (entre 15 et 23 millions de km²), soit une superficie 50 fois supérieure à celle de la France.

Le permafrost se trouve principalement dans les régions polaires, à 80 % en Sibérie. Les autres zones composées de permafrost se trouvent au Canada, en Alaska, sur le plateau Tibétain, sur les côtes du Groenland, en Scandinavie, sous les océans, ainsi que dans certaines chaînes de montagnes.

Composé de glaces, de sols et de roches gelés, le permafrost se divise en deux couches.

Une couche superficielle, aussi appelée la couche active. Cette première couche fait quelques centimètres à plusieurs mètres d’épaisseur et fond tous les étés avant de regeler chaque hiver.

La seconde couche est la partie la plus importante du permafrost. Située en dessous de la couche active, celle-ci peut aller de quelques mètres, à plusieurs kilomètres de profondeur.

Selon la communauté scientifique, une grande partie du permafrost s’est formée dans une période datant entre 8 000 et 12 000 ans. Néanmoins, par endroits, celui-ci peut dater de plusieurs millions d’années.

À ce jour, entre 3 et 4 millions de personnes vivent sur des terres composées de permafrost.

En accélération progressive depuis plusieurs décennies, la fonte du permafrost menace non seulement l’équilibre naturel des écosystèmes et le climat, mais aussi les infrastructures et les sociétés humaines d’un point de vue sanitaire et économique.

Un danger au niveau climatique

La fonte du permafrost représente un défi majeur pour le climat mondial. Ce phénomène déclenche un cycle de rétroaction potentiellement dévastateur, contribuant de manière significative au changement climatique actuel.

En effet, la fonte du permafrost est principalement liée à l’augmentation des températures anormales dans les régions où il se trouve.

Dans les îles arctiques du Canada, les chercheurs constatent d’ores et déjà des indices de dégels moyens de 150 % à 240 % supérieurs à la normale des années 1979-2000.

Alors que les sociétés humaines s’engagent de plus en plus dans la réduction de l’empreinte carbone dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, la fonte du permafrost pourrait bouleverser la donne dans des proportions immenses.

En effet, le permafrost mondial contiendrait environ 1 500 milliards de tonnes de CO2, soit plus du double de la quantité actuellement présente dans l’atmosphère.

Pire encore, le permafrost contient énormément de méthane (CH₄). Bien que celui-ci ne reste qu’approximativement 12 ans dans l’atmosphère contre plusieurs siècles pour le CO2, ce gaz a un effet de serre au potentiel de réchauffement 25 fois supérieur au dioxyde de carbone.

Avec la décongélation, accélérée par la hausse des températures, ces gaz sont relâchés dans l’atmosphère, exacerbant l’effet de serre et accélérant le réchauffement planétaire.

Ce processus crée un cercle vicieux, car le réchauffement climatique induit la fonte du permafrost, libérant davantage de gaz à effet de serre, ce qui, à son tour, intensifie le réchauffement.

Un danger au niveau sanitaire

La fonte du permafrost soulève également des préoccupations sanitaires considérables, mettant en évidence plusieurs risques pour la santé humaine et animale.

En plus de centaines de milliards de tonnes de CO2, le permafrost renferme aussi de nombreuses bactéries et agents pathogènes congelés et disparus depuis plusieurs milliers, voire millions d’années.

Lorsqu’il dégèle, le permafrost, qui conserve depuis des millénaires des matières organiques et des agents pathogènes, libère ces éléments potentiellement dangereux, posant ainsi des défis sérieux pour la santé publique.

La libération de matières organiques anciennes peut contenir des agents pathogènes, des virus et des bactéries, certains étant inconnus ou éteints depuis longtemps.

La réapparition de ces agents pathogènes pourrait représenter un risque de maladies infectieuses pour les populations humaines et animales qui entrent en contact avec ces zones dégelées.

En 2016, au nord de la Russie, un jeune garçon est par exemple mort de l’anthrax, une maladie pourtant disparue depuis plus de 70 ans. Probablement issue du dégel d’un cadavre de renne mort de cette maladie il y a plusieurs dizaines d’années, la bactérie mortelle a ensuite infecté de nombreux troupeaux de rennes dans la région.

Un exemple illustrant ce qui pourrait arriver si des pathogènes plus anciens ou plus virulents étaient ramenés à la vie par la fonte du permafrost.

Enfin, la fonte du permafrost peut libérer des contaminants chimiques persistants, tels que des métaux lourds ou des produits chimiques toxiques, qui étaient piégés dans le sol gelé.

Ces substances toxiques, une fois relâchées, peuvent contaminer les ressources en eau potable et les chaînes alimentaires, présentant ainsi des risques pour la santé humaine et animale à long terme.

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Les conséquences de la fonte du permafrost

La déformation du sol

La fonte du permafrost engendre des risques significatifs de déformation du sol, provoquant des impacts majeurs sur les infrastructures des populations locales, ainsi que pour les écosystèmes naturels.

Ce phénomène de dégel peut entraîner plusieurs formes de déformations du sol, notamment des affaissements, des phénomènes d’érosion côtière, des glissements de terrain, sans oublier les risques de destruction des fondations et des infrastructures pour les populations locales.

Lorsque le permafrost se décongèle, les sols qui étaient autrefois gelés deviennent plus meubles et moins stables. Cela peut conduire à des affaissements de terrain, affectant directement les infrastructures humaines telles que les routes, les bâtiments, les pipelines et les ponts.

Les fondations sur lesquelles reposent ces structures peuvent devenir instables, entraînant des dommages structurels et posant des risques pour la sécurité publique.

Les glissements de terrain sont également une conséquence fréquente de la fonte du permafrost. Lorsque le sol gelé perd sa cohésion, il peut glisser en masse, causant des dommages étendus aux paysages et aux zones habitées.

Ces glissements de terrain peuvent être soudains et dévastateurs, entraînant des pertes matérielles importantes et menaçant la vie des habitants des régions concernées.

Enfin, les déformations du sol influent sur les écosystèmes naturels en perturbant les habitats des espèces végétales et animales adaptées aux conditions du permafrost. Ces altérations peuvent modifier les équilibres écologiques locaux, affectant la biodiversité et la résilience des écosystèmes.

Le déséquilibre de l’écosystème

Tout d’abord, la décongélation du permafrost peut altérer les conditions du sol, affectant directement la croissance et la distribution des plantes.

Certaines espèces végétales adaptées au froid pourraient perdre leur habitat, tandis que de nouvelles espèces plus adaptées aux températures plus chaudes pourraient s’installer, modifiant ainsi la biodiversité végétale locale.

En conséquence, les changements dans la végétation peuvent avoir des répercussions sur les espèces animales qui dépendent de ces plantes pour la nourriture et l’abri.

Les modifications dans les habitats pourraient forcer les animaux à migrer vers de nouveaux endroits pour survivre, perturbant ainsi les chaînes alimentaires et les équilibres écologiques.

Enfin, la décongélation du permafrost peut perturber les régimes hydrologiques en altérant la perméabilité du sol. Cela peut influencer le débit des cours d’eau, la formation de lacs et de marécages, impactant ainsi les écosystèmes aquatiques et la disponibilité en eau pour les plantes, les animaux et les humains.

L’augmentation des températures

Dans les régions où le permafrost est présent, les températures ont augmenté plus rapidement que la moyenne mondiale.

Les données scientifiques indiquent que l’Arctique se réchauffe environ deux à trois fois plus vite que le reste de la planète.

Ce réchauffement accru est attribué à plusieurs facteurs, notamment les rétroactions climatiques, les changements dans les systèmes atmosphériques et océaniques, ainsi que les émissions de gaz à effet de serre d’origine humaine.

En raison du réchauffement climatique, les températures dans les régions de permafrost augmentent, déclenchant alors la fonte de ces sols gelés.

Ce phénomène crée un cercle vicieux : à mesure que le permafrost fond, il libère d’énormes quantités de carbone organique piégé depuis des millénaires sous forme de matière végétale et animale décomposée.

Lorsque cette matière organique se décompose, elle produit du dioxyde de carbone et du méthane. Ces gaz, puissants en termes d’effet de serre, sont relâchés dans l’atmosphère, contribuant à un renforcement de l’effet de serre et, par conséquent, à un réchauffement supplémentaire de la planète.

Cette libération de gaz à effet de serre provenant de la fonte du permafrost crée un cycle de rétroaction positif, où le réchauffement climatique entraîne la fonte du permafrost, libérant ainsi davantage de gaz à effet de serre, ce qui amplifie à son tour le réchauffement.

Contenant environ 1 500 milliards de tonnes de CO2, soit 40 fois ce que nous émettons actuellement (36 milliards de tonnes en 2022), la fonte du permafrost porte à elle seule le risque d’une augmentation potentielle de plusieurs degrés.

Comment lutter face à la fonte du permafrost ?

Réintroduire les animaux et les prairies pour réduire la fonte du permafrost

Certains scientifiques et écologistes ont proposé l’idée ambitieuse de recréer des écosystèmes semblables à ceux où vivaient les mammouths en Sibérie dans le but de contrer les effets du changement climatique.

Cette théorie repose sur l’introduction d’espèces animales de grande taille, comme les rennes, les bisons, les chevaux iakoutes ou les bœufs musqués, pour influencer positivement l’écosystème et potentiellement ralentir la fonte du permafrost.

L’idée principale est que ces grands herbivores pourraient, par leurs déplacements, leur pâturage et leur impact sur le sol, contribuer à tasser la neige et les sols.

Ceci aurait pour effet de limiter l’accumulation de neige qui agit comme isolant thermique et un réflecteur des rayons du soleil.

De plus, leur présence pourrait modifier la végétation et les caractéristiques du paysage, réduisant potentiellement l’absorption de chaleur par le sol.

Il y a environ vingt-cinq ans, Sergueï Zimov, un scientifique russe, géophysicien spécialisé en géochimie et en écologie arctique et subarctique, a lancé le projet du parc du Pléistocène près de Tcherski.

Celui-ci vise à réintroduire des grands herbivores pour restaurer les prairies et contrer la fonte du permafrost. Depuis, des chevaux sauvages, des yacks, des bisons et des moutons ont été placés dans cette zone de 144 km².

Cette initiative pourrait ralentir le dégel du permafrost et donc, atténuer le changement climatique. Toutefois, pour avoir un impact significatif, il faudrait implanter plusieurs millions de ces animaux dans les régions où a lieu la fonte du permafrost.

Les prévisions de la fonte du permafrost

Selon les experts du GIEC, la fonte du permafrost global pourrait être massive d’ici à la fin du siècle.

Selon les dernières projections, 1 °C de réchauffement équivaudrait à une fonte du permafrost entraînant une libération de CO2 située entre 14 et 175 milliards de tonnes de CO2.

Le scénario le plus optimiste où l’augmentation de la température respecte les seuils de l’accord de Paris (+ 1,5 °C) provoquerait une fonte du permafrost impliquant une disparition de sa superficie allant de 8 % à 40 %.

Le scénario le plus pessimiste, qui envisage une envolée de la température mondiale au-delà de 1,5 °C envisage une fonte du permafrost entre 49 % et 89 % de sa superficie totale d’ici à 2100.

Quel que soit le scénario, la fonte du permafrost entraînera une libération gigantesque de gaz à effet de serre, de bactéries et de virus anciens, avec des répercussions imprévisibles pour les populations locales et le climat mondial.

Conclusion

La notion de permafrost fait référence à la couche de sol gelé en permanence dans les régions arctiques et subarctiques.

La fonte du permafrost est liée au changement climatique dans une boucle de rétroaction vicieuse. Ce phénomène, provoqué par l’augmentation des températures, provoque lui-même la libération de gaz à effet de serre qui amplifie à son tour le réchauffement.

Les avertissements émis par la communauté scientifique concernant la fonte du permafrost révèlent des risques majeurs pour la planète.

Ces dangers englobent une libération massive de carbone et de méthane, des perturbations considérables des écosystèmes ou encore la libération potentielle de pathogènes anciens.

De plus, la fonte du permafrost fait courir le risque de dommages significatifs en matière d’infrastructures, de sécurité alimentaire, de migrations et de pertes humaines et économiques.

Si le rythme actuel de fonte du permafrost se maintient, entre la moitié et la quasi-totalité de ce sol gelé pourraient disparaître d’ici à la fin du siècle, laissant entrevoir une accélération accrue du changement climatique.

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Crédits photos : Magic K, Wirestock

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